Πέμπτη 11 Αυγούστου 2016

Gregorios, Métropolite du Cameroun: «Dans deux ou trois siècles, le foi orthodoxe en Afrique aura sûrement sa propre identité», «Les tribus locales ont constaté que nous n’étions pas simplement une Église de colons»



Recueilli par Samuel Lieven (à Kolympari, Crète), le 26/06/2016 à 14h59
la-croix.com
Les photos du site web de Métropolis Cameroun

Métropolite du Cameroun et exarque d’Afrique Centrale (Tchad, Guinée équatoriale, République centrafricaine) depuis douze ans, Mgr Gregorios participe à la rédaction du message final du concile orthodoxe réuni en Crète jusqu’au dimanche 26 juin (2016).
La présence d’Africains et d’évêques européens en mission rappelle aux délégations du vieux continent la vocation missionnaire de l’Église orthodoxe.

Mgr Gregorios : L’Église orthodoxe est arrivée au Cameroun avec les premières communautés grecques dans les années 1890. Rattachée au Patriarcat grec-orthodoxe d’Alexandrie, elle compte aujourd’hui environ 100 000 fidèles. Essentiellement composée de Grecs à ses débuts, elle s’est réorientée vers les populations locales après le départ de la diaspora grecque au tournant années 1980.
Parallèlement, nous avons lancé des missions dans des régions très difficiles abandonnées par les catholiques et les protestants, à l’extrême nord du Cameroun et aux abords du lac Tchad. Dans ces lieux retirés où il n’y a rien, nous avons construit des écoles, des hôpitaux, creusé des puits… Les tribus locales ont alors constaté que nous n’étions pas simplement une Église de colons, mais bien une Église missionnaire étrangère née au Cameroun. Sur 30 prêtres orthodoxes, 27 sont aujourd’hui des Camerounais.

La foi orthodoxe est néanmoins présente depuis longtemps en Afrique…

Mgr Gregorios : Sa présence remonte aux origines du christianisme : Égypte, Nubie, Éthiopie, mais aussi dans toute l’Afrique du Nord où nous comptons de nombreux martyrs jusqu’en Mauritanie. C’est l’arrivée de l’islam qui a éradiqué la foi orthodoxe dans toutes ces régions, avant que les missions ne viennent la réimplanter sur le tard. En dehors des grandes Églises autochtones éthiopienne et copte, on évalue aujourd’hui à deux millions le nombre de chrétiens orthodoxes issus des missions.


Comment expliquer son développement aujourd’hui ?

Mgr Gregorios : La première raison, c’est que nous ne demandons pas d’argent comme le font les protestants qui exigent le versement d’un dixième des revenus. Alors que rien n’est gratuit en Afrique, nous offrons tout ce que nous avons. De ce point de vue, la crise économique en Grèce a rendu notre situation plus compliquée car les grands donateurs sont de moins en moins nombreux. Enfin, le mariage autorisé pour les prêtres orthodoxes nous rapproche davantage de la mentalité africaine.



Toutefois, les Africains passent très facilement d’une Église à l’autre. Le syncrétisme – mélange de christianisme avec les croyances ancestrales – est omniprésent. Mais une nouvelle génération d’Africains qui a grandi dans l’Église orthodoxe forme à présent une communauté beaucoup plus cohérente et resserrée.

Qu’attendez-vous, vu d’Afrique, du concile orthodoxe ?

Mgr Gregorios : Ce concile nous donne un espace pour informer les autres Églises de l’existence de la mission et des problèmes spécifiques que nous rencontrons : pauvreté, guerres, violences… En Grèce, où presque 100 % de la population se déclare grec-orthodoxe, beaucoup de gens ignorent que leur Église est aussi missionnaire. Sans cela, elle serait dépourvue d’orientation évangélique.
Si le soutien spirituel et financier des autres Églises est capital, nous avons surtout besoin de volontaires. Nous travaillons à la naissance d’une Église qui demain sera peut-être autonome, avec sa hiérarchie et ses propres relations avec les autres Églises. Dans deux ou trois siècles, le foi orthodoxe en Afrique aura sûrement sa propre identité, à l’image de la liturgie byzantine que nous avons traduite dans différents dialectes tout en l’accompagnant avec la danse et le tam-tam… À l’instar des Byzantins qui ont autrefois enfanté des Églises orthodoxes dans les pays slaves. Elles ont aujourd’hui leurs propres modes d’expression. Sur le vieux continent, notre foi a deux mille ans. En Afrique subsaharienne, nous sommes encore en 150 après Jésus-Christ !

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